Chacun alors s'offrit pour ce mortel honneur, mais Malick Sy resta muet jusqu'à ce qu'un jeune homme du nom de Yamadou Hâvé se fût proposé.
Alors le marabout déclara : « Celui-ci est l'homme que j'attendais !
— Voilà qui est bien, dit Yamadou aux Peuhls, mais puisque je m'offre pour votre salut, je vous demande de consentir à votre tour à mes demandes ! »
Il y avait là quatre tribus peuhles : les Diallo, les Diakhité, les Sidibé, les Sankaré. Toutes donnèrent leur consentement.
« Le marabout, reprit Yamadou, a dit que, par la vertu du talisman, je mourrai demain pour le salut de ma race. Je suis prêt mais j'ai trois enfants : deux garçons et une fille ; le premier est Ségo Dohi, le deuxième Mamadou Dohi et la troisième Sané Dohi. Chers Peuhls, je vous les confie, eux et leurs enfants ! Je demande que leurs descendants commandent aux Peuhls du Khasso. Je désire qu'ils puissent épouser les femmes de votre race. »
Les Peuhls, à l'unanimité, déclarèrent qu'il en serait selon son désir.
C'est à la mare de Tombi-Fara que se produisit le choc entre les Malinké et les Peuhls.
Le combat à peine commencé, Yamadou Hâvé se précipita, flèche en main, au milieu des ennemis pour les frapper à mort. Il se battit vaillamment et ne tomba qu'au moment où les Malinké prirent la fuite. Et la prédiction du marabout fut entièrement réalisée. Les Peuhls remportèrent la victoire tandis que leurs adversaires, ayant perdu leur roi, furent en grande partie anéantis.
La paix fut ainsi assurée pour de longues années et les Peuhls s'acquittèrent de leur dette envers les enfants du héros. Ils les élevèrent avec considération. Ils firent de Ségo Dohi leur roi dès sa majorité et maintinrent le pouvoir suprême à ses descendants.