Les gestes barrière

L'histoire

Salut, je m'appelle Mayla. Je suis en Primaire. Comme beaucoup d'enfants en Europe, depuis quelque temps, je ne peux plus aller à l'école et je dois rester chez moi avec mes parents. Je vais vous raconter pourquoi.
Tout a commencé le jour où j'ai entendu son nom pour la première fois : ça faisait « Coro… quoi ? » le Coronavirus ! Il a le nom d'un personnage fantastique, d'un Pokémon ou d'un légionnaire romain dans Astérix mais, en réalité, il ne fait pas rêver du tout !
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Si j'ai bien compris, c'est un méchant virus que l'on peut voir uniquement avec un microscope ultrapuissant : on dirait un oursin, avec des piquants qui ressemblent à des bouts de cotons-tiges. Il fait partie de la grande famille des virus à couronne et c'est pour ça qu'on lui a donné ce nom : « Corona » veut dire « couronne », en latin. Le latin, c'est une ancienne langue qui ne se parle plus, mais qui est à l'origine d'autres langues comme le français, l'italien ou l'espagnol, et que les scientifiques utilisent beaucoup.
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Au fait, c'est quoi un virus ?

La maîtresse nous a expliqué que c'est une sorte de minuscule parasite qui s'attaque à des cellules d'animaux, de plantes… Il existe beaucoup de sortes de virus, mais chacun a un hôte bien particulier. Un hôte, c'est l'être vivant qui l'héberge, contre sa volonté. C'est un peu comme si le virus « squattait » chez son hôte. Par exemple, le virus d'une chauve-souris se transmet d'une chauve-souris à une autre. Seulement parfois, lorsque le virus se multiplie, il se transforme : on dit qu'il mute. Et il peut alors réussir à se transmettre à un autre animal. C'est probablement ce qui s'est produit avec le Coronavirus : il est passé d'un animal sauvage à l'Homme.
Les premiers cas de Coronavirus sont apparus en Chine fin 2019. Comme les gens peuvent se déplacer beaucoup et facilement grâce aux avions et aux trains, ceux qui étaient contaminés ont répandu le virus rapidement dans d'autres pays, comme en Italie ou en France, par exemple.
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Mais comment nous rend-il malade ?

Le Coronavirus rentre dans notre corps en passant par nos voies respiratoires (le nez, la bouche, les poumons, les bronches). Ensuite, il utilise nos cellules, comme des photocopieuses, pour se développer et se multiplier. Tout cela fatigue beaucoup notre corps, et on tombe malade. Cette maladie a été appelée COVID-19 par les chercheurs. C'est assez bizarre comme nom…
Un malade a de la fièvre, le nez qui coule et surtout, il tousse beaucoup. Parfois même, il n'arrive plus à respirer correctement. Il va alors à l'hôpital où les médecins essaient de l'aider.

Comment fait-on pour s'en débarrasser ?

Pour lutter contre ce virus, il n'y a pas encore de médicament ni de vaccin, car il est trop nouveau. Les chercheurs du monde entier travaillent beaucoup pour trouver une solution. En attendant, on doit apprendre « les gestes barrière ». Pas besoin d'être champion de karaté pour les appliquer : ce sont des gestes tout simples, qui nous protègent, et qui protègent les autres.
Ce virus se transmet surtout par les postillons, les gouttelettes que l'on projette quand on éternue, quand on tousse ou quand on parle. Ces minuscules gouttes peuvent atterrir directement sur quelqu'un ou sur des objets comme les poignées de porte ou les barres du métro. Si une personne touche cet objet contaminé, elle peut être contaminée à son tour en se touchant le nez ou la bouche. Il faut donc tousser ou éternuer dans son coude et pas dans sa main. J'avoue qu'au début, j'ai eu du mal à le faire et puis, avec les copains, on a transformé ça en « dab » ! Vous savez, ce petit mouvement de danse utilisé par les joueurs de foot pour célébrer leurs buts. On a bien rigolé !
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Il paraît que ce virus peut rester actif très longtemps sur les objets. Quelqu'un peut donc l'attraper s'il entre en contact avec quelque chose touché plusieurs heures avant par une personne qui est malade ! Alors, à l'école, on nous a appris à nous laver les mains. Au départ, j'ai cru à une blague ! Et en fait, j'ai découvert que… je ne savais pas le faire ! Eh oui ! C'est toute une technique ! Il faut se mouiller les mains, mettre du savon, frotter entre les doigts, frotter un pouce puis l'autre, et frotter ses ongles avec la méthode du « museau de chat » : ça consiste à faire un museau de chat avec une main, que l'on frotte au creux de l'autre main. Puis, pour finir, on rince ! On doit se laver les mains pendant au moins 20 secondes… La maîtresse nous a donné une astuce : il suffit de chanter Une souris verte ! Quand le premier couplet est fini, c'est que l'on peut arrêter ! À l'école, Arthur chantait tellement faux que ça nous cassait les oreilles… On s'essuie les mains dans des serviettes en papier, que l'on jette ensuite. Et tout ça, il faut le faire le plus souvent possible.
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La pire des consignes, c'est de garder 1 mètre de distance entre nous… Fini les câlins et les jeux collectifs avec les copains comme le « chat glacé » ou le foot… trop dur ! Même les adultes ont arrêté de se serrer la main ou de s'embrasser pour se dire bonjour. Ils se tapent les coudes. C'est marrant, ça change ! Mes parents m'ont montré une image où on voit une longue file de personnes qui attendent devant un supermarché. Elles sont bien éloignées les unes des autres et rentrent petit à petit dans le magasin. De cette façon, on peut aller acheter à manger sans risquer d'entrer en contact avec trop de monde et de se contaminer.
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Enfin, ça, c'était au début, car depuis quelques jours, les choses sont bien différentes…
Un jeudi soir, le président de la République nous a annoncé que toutes les écoles de France allaient fermer après le week-end. Ce que j'ai ressenti ? Un méga mélange de joie, de déception et d'incompréhension : la joie de rester à la maison et de jouer toute la journée dans ma chambre ; la déception de ne plus voir les copains et ma maîtresse. Le lundi soir, le Premier ministre a parlé : le virus se propage trop vite et le seul moyen de l'arrêter, c'est le confinement… Ce mot, je ne le connaissais pas du tout. Être confiné, c'est rester chez soi et surtout en sortir le moins possible.
On a juste le droit de sortir pour faire des courses, pour aller chez le médecin, pour promener son chien et pour se dégourdir les jambes pas loin de chez nous. Ça évite que les gens se rencontrent, discutent, se touchent et se transmettent le virus.
Mes parents m'ont expliqué que le virus se transmettait de plus en plus et qu'il pouvait être très dangereux pour les personnes âgées et les gens fragiles. J'ai tout de suite pensé à mes grands-parents… Ma grand-mère, plutôt en bonne forme, et mon papy qui est dans une maison médicalisée, un EHPAD, avec plein d'autres personnes âgées. D'ailleurs, les gens qui s'occupent bien de lui nous ont appelés pour nous dire que les visites aux grands-parents n'étaient plus autorisées. J'ai bien compris que c'était pour les protéger du virus et éviter de le faire rentrer dans leur maison. Depuis, on s'appelle encore plus et on s'envoie des photos. On a même pu se voir en vidéo !
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Il y a mon tonton, aussi. Il n'y a pas longtemps, il a eu besoin d'un nouveau rein, car les siens ne fonctionnaient plus correctement. Pour que son corps accepte bien ce nouveau rein, il doit prendre chaque jour des médicaments qui diminuent les défenses de son organisme. Il fait donc partie des personnes fragiles à protéger.
Certaines personnes ont le droit d'aller travailler, comme les infirmiers, les médecins et toutes les personnes qui ont un métier indispensable à la population. J'ai vu que certains portaient des masques et pas d'autres. Les gens qui sont malades doivent porter un masque rectangulaire, posé sur le nez et sur la bouche, pour ne pas transmettre le virus aux autres. Les personnes qui soignent ou qui sont en contact avec les malades portent aussi des masques, mais cette fois-ci pour se protéger. Ces masques ont la forme d'un bec de canard.

Comment se passe le confinement ?

Très vite, notre maîtresse a envoyé des e-mails à mes parents : c'étaient des exercices à faire tous les jours de la semaine pour continuer à apprendre des choses et à s'entraîner. Même la prof de sport nous a envoyé des activités à faire en restant à la maison ! Le confinement, c'est pas les vacances ! Maintenant, il y a aussi des maîtresses et des maîtres qui donnent des cours à la télévision. Je suis super fière, parce que j'ai appris à faire de nouveaux calculs !
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Sur Internet, il y a même des gens qui lisent des livres. C'est génial, parce que comme on ne peut plus aller à la médiathèque, j'ai découvert de nouvelles histoires !
Les parents nous aident quand ils peuvent, mais ils doivent aussi travailler de la maison. On appelle ça le télétravail. Une fois encore, cela permet de limiter les contacts. Ce n'est pas toujours facile de travailler dans un petit espace partagé par toute la famille toute la journée. Et surtout, avec nous, les enfants curieux, qui rôdons juste à côté d'eux…

Et ça va durer encore longtemps ?

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On ne sait pas combien de temps ça va durer… et ça, c'est difficile… La famille, les copains, l'école et les activités dehors commencent déjà à me manquer. Mais je sais que c'est important de le faire pour les autres : plus on sera nombreux à suivre ces règles, moins le virus pourra toucher de personnes.
Tous les soirs, à 20 heures, on ouvre la fenêtre et on applaudit les personnels soignants et les gens qui aident les autres. C'est sympa et émouvant aussi… Il y en a même qui tapent sur des casseroles ! Et quand c'est fini, avec les voisins, on se dit… « À demain ! » Peut-être même que la prochaine fois on pourrait chanter tous ensemble, comme ils font en Italie !
En fait, en restant chez nous, on se protège et on protège les gens qu'on aime et ceux qu'on côtoie. Et si nous sommes tous éloignés les uns des autres pour quelque temps, à nos fenêtres, à nos balcons… eh bien applaudir à l'unisson, c'est aussi une façon de montrer qu'on est tous ensemble, à se battre pour vaincre cet affreux virus.
Mélanie Perez, Les gestes barrière, ill. Thomas Tessier